Sous la lumière lunaire filtrant doucement à travers les hautes fenêtres, la bibliothèque municipale semblait presque magique. Les étagères, hautes et remplies de livres aux couleurs vives, s'étendaient comme des corridors infinis de savoir et d'imaginaire, tandis que le silence régnait en maître, seulement interrompu par le tic-tac régulier de l'horloge grand-père.
Vincent, le jeune vampire de trois cent cinquante-deux ans — un véritable adolescent dans le monde des vampires —, avait l'habitude de venir à la bibliothèque après la tombée de la nuit. Non pas qu'il avait peur du soleil : doté d'un charme magique en forme de parapluie, il pouvait se protéger des rayons brûlants. Mais il aimait ce moment où le monde semblait suspendu, quand les histoires et les rêves prenaient vie.
Cette nuit-là, Vincent tenait à la main son parapluie favori, un magnifique ouvrage noir parsemé de constellations qui brillait dans l'obscurité. Son but était de trouver un livre rare sur les créatures marines, un sujet qui le fascinait depuis qu'il était tout petit. Il n'avait jamais vu la mer, interdite aux vampires en raison de son immensité ouverte et de son absence d'ombre où se cacher, mais il rêvait d'océans, de vagues, et surtout, de baleines.
Alors qu'il parcourait distraitement une section particulièrement obscure et poussiéreuse de la bibliothèque, un rayon de lune vint éclairer une étagère jusqu'alors dissimulée. Sur une couverture bleu profond, des mots scintillaient comme l'eau sous les étoiles : Les Mystères des Profondeurs. Sans hésiter, Vincent attrapa le livre et, sous le regard surpris des portraits des anciens bibliothécaires accrochés aux murs, il s'installa dans un large fauteuil en cuir pour débuter sa lecture.
À peine avait-il ouvert le livre qu'une voix retentit dans la salle :
— Salutations, jeune voyageur des mots.
Vincent sursauta, son parapluie s'échappant de ses doigts et s'ouvrant avec un 'clack' théâtral sur le sol.
— Qui est là ? demanda-t-il, cherchant des yeux l'origine de cette voix douce et mélodieuse.
— Regarde dans ton livre, répondit la voix.
Intrigué, Vincent porta son regard sur la page ouverte devant lui. À sa grande surprise, une image de baleine, illustrée avec un soin presque réel, semblait bouger, ses yeux pétillant d'une intelligence profonde.
— Je suis Bella, la baleine gardienne des secrets des océans, murmura l'image. Et toi, qui es-tu donc, ami nocturne ?
Ébahi, Vincent répondit :
— Je suis Vincent, un vampire… mais un vampire qui rêve d'océans.
Ce début de conversation marqua le début d'une amitié extraordinaire. Bella enseigna à Vincent les secrets des profondeurs marines, les légendes des navires engloutis, et les chants des baleines. En retour, Vincent partageait avec Bella les récits de la terre ferme, des forêts impénétrables et des montagnes touchant les cieux.
Dans cette bibliothèque, sous la lumière de la lune, un vampire et une baleine partageaient les histoires de leurs mondes respectifs, établissant un pont entre la terre et la mer.
— Vincent, dit un jour Bella, ta soif de connaissance et ton cœur ouvert sont un trésor bien plus grand que tous les livres de cette bibliothèque.
— Et toi, Bella, tu m'as appris à voir au-delà des apparences, à chercher la magie dans l'inattendu, répondit Vincent, des étoiles dansant dans ses yeux.
Vincent réalisait désormais que son parapluie n'était pas seulement une protection contre le soleil, mais aussi un symbole de son voyage à travers les histoires et les rêves. Il conservait en lui un morceau du monde marin de Bella, et en échange, Bella portait désormais en elle l'esprit aventureux et nocturne de Vincent.
Avec le premier rayon de soleil, signalant le retour du jour et le moment pour Vincent de se retirer, il referma doucement le livre, sachant que l'amitié qu'il avait tissée avec Bella perdurerait à travers les pages et le temps.
Il quitta la bibliothèque, son parapluie en main, un sourire énigmatique aux lèvres, laissant derrière lui l'écho d'une amitié hors du commun et la promesse de nombreux retours.